La taxe Tobin, également appelée taxe « Robin des Bois », fait une nouvelle fois parler d’elle. Lancée en 1971 par l’Américain James Tobin, prix Nobel d’économie, et défendue depuis des années par le mouvement altermondialiste, la taxe sur les transactions financières est perçue comme un moyen de moraliser le secteur financier, de financer l’aide aux pays pauvres ou de faire rembourser par les banques une partie des déficits publics creusés par les aides massives qui ont dû leur être apportées. Mais elle divise les dirigeants européens. Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a déclaré soutenir l’idée d’une telle taxe à condition qu’elle s’applique au niveau mondial et « ne mette pas en cause la compétitivité de l’Europe » en provoquant un exil des banquiers de Londres et Francfort. Fin août, la taxe Tobin avait déjà reçu le soutien du chef de l’autorité britannique des services financiers (FSA), Adair Turner, et du ministre allemand des Finances, Peer Steinbrück. Depuis, la chancelière allemande, Angela Merkel, l’a à son tour jugée « sensée », tandis que son homologue autrichien Werner Faymann s’est dit « personnellement très favorable ». De son côté, le président français Nicolas Sarkozy l’a qualifiée de « financement innovant » pour l’aide aux pays pauvres. En revanche, le Premier ministre suédois, Fredrik Reinfeldt, dont le pays préside actuellement l’UE, ne pense pas « que ce que ce soit la réponse ».
La zone géographique d’application de la taxe fait débat. L’Europe peut-elle s’engager seule sur cette voie sans être suivie, notamment par les États-Unis ? Werner Faymann estime que l’Europe est « assez forte ». « Nous devrions mettre (la taxe) en place au niveau européen », même si les autres n’en veulent pas, a-t-il suggéré. D’autres s’y opposent. Jean-Claude Juncker a averti que la taxe Tobin devrait « trouver une application territoriale totale à travers la planète si jamais nous voulions l’appliquer avec succès ». Selon lui, d’« autres mécanismes de taxation, notamment des opérations boursières, qui ne revêtent pas toutes les caractéristiques de la taxe Tobin, pourraient être intelligemment envisagés ». Le Premier ministre britannique Gordon Brown a, lui aussi, jugé la taxe impraticable autrement qu’à l’échelle mondiale. « C’est très difficile tant que nous ne sommes pas sûrs d’avoir une action mondiale, que c’est général et qu’il n’y a pas d’autorité ou de territoire qui peuvent facilement l’éviter », a-t-il déclaré. Alors qu’il y a trente-huit ans, James Tobin pensait taxation des devises, la France milite pour un prélèvement sur toutes les transactions financières (devises, actions, obligations, etc.). Selon le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner, un taux de 0,005 % pourrait rapporter entre 20 et 30 milliards d’euros par an, selon la nature des transactions concernées. Un montant qui serait utilisé pour financer l’aide au développement.