La dette française dans le colimateur de plusieurs rapports économiques internationaux

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La France devra fournir des efforts considérables pour conserver la confiance des marchés et ne pas connaître le sort de la Grèce.

« Il n’y a pas de risque de dégradation de la signature française dans la période actuelle. La signature française et la signature allemande sont des signatures-refuge ». Si le ministre français du Budget, François Baroin, se veut rassurant, la pression monte semaine après semaine sur les finances publiques. Pour preuve, sans attendre une conférence sur le déficit le 20 mai et la présentation de son programme de stabilité européen le 2 juin à Bruxelles, le Premier ministre français François Fillon a lancé un signal en annonçant début mai « 5 milliards d’euros d’économies en deux ans sur les niches fiscales ».

 

La France, qui s’était engagée à réaliser 2 milliards d’euros d’économies par an sur les niches entre 2011 et 2013, a donc relevé d’un milliard d’euros son objectif sur la période 2010-2011, le gouvernement entend ainsi compenser l’abandon de la taxe carbone qui devait rapporter 1,2 milliard d’euros net. Il montre également sa détermination à « tout faire pour conserver la signature » de la France, « un pilier de la stabilité européenne ». Actuellement, la dette souveraine de la France est notée AAA avec perspective stable, soit la meilleure possible, par les agences de notation.

 

Mais, évoquée par la Cour des comptes en février dernier, le risque d’une dégradation de cette note, suivie d’un emballement de la dette, transparaît dans plusieurs études économiques récentes. Avec un déficit équivalent à 7,5 % du PIB en 2009 et une dette à 77,6 %, la France se situe en 6e position des pays de la zone euro dont la situation financière est la plus préoccupante, selon le classement établi par le rapporteur général de la Commission des finances du Sénat, Philippe Marini. À l’instar de la Commission européenne, Philippe Marini juge peu réaliste certaines hypothèses du plan français : croissance de 2,5 % partir de 2011 (Bruxelles table sur 1,5 %), quasi-stabilité des dépenses, rentrées fiscales assez soutenues.

 

Selon un document de travail publié en mars par la Banque des règlements internationaux, la France est le grand pays de la zone euro qui devra fournir le plus d’effort pour ramener sa dette publique à son niveau de 2007, soit au-dessus de 3 % du PIB. Pour y parvenir en vingt ans, elle devrait ainsi dégager un excédent primaire (c’est-à-dire hors charge de la dette) de 2,8 % du PIB par an en moyenne, contre un déficit primaire estimé de 2,5 % en 2011. L’Italie aurait besoin d’un excès primaire de 2,5 %, l’Allemagne de 2,4 % et l’Espagne de 1,3 %. À l’inverse, le programme de stabilité transmis par la France à la Commission européenne prévoit que le déficit reviendra à la limite de 3 % dès 2013 ou 2014. « Nous allons, pour la loi de finances 2011, être exemplaires », a promis François Baroin. Mais jusqu’ici, la France n’a tenu aucun de ses programmes de stabilité depuis la création de l’euro. « Si l’on estime pouvoir continuer ainsi, on prend un risque énorme, systémique », s’alarme Philippe Marini. L’exemple grec semble en tout cas avoir marqué les Français, dont 75 % pensent que la France pourrait connaître une situation de crise comparable à celle de la Grèce.

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