Au lendemain de la crise financière de 2008, alors que la circulation des biens et services était atone, les échanges algéro-allemands affichaient une croissance soutenue : +19 % pour les exportations allemandes vers l’Algérie en 2009! Il ne s’agissait pas d’une année exceptionnelle, mais bien d’un chiffre révélant une tendance de fond. « Les relations économiques entre les deux pays ont connu au cours des dernières années une évolution très positive. Le développement des échanges bilatéraux, qui a atteint en 2010 2,3 milliards d’euros, ainsi que l’engagement des entreprises allemandes en Algérie, notamment dans le cadre d’investissements directs et de joint-ventures, sont le reflet de cet essor », explique Amelia Zinke, deuxième vice-présidente de la Chambre de commerce algéro-allemande (AHK Algérie).
En dix ans, le commerce entre les deux pays a doublé en valeur, tous secteurs confondus. L’Allemagne est aujourd’hui le 5e fournisseur de l’Algérie. Près de 200 entreprises d’outre-Rhin sont désormais implantées dans le pays. Ce rapprochement devrait se poursuivre, à en juger par les intentions affichées de part et d’autre. Entre juin et décembre 2011, une dizaine de journées d’information et de forums économiques sont prévues en Allemagne pour promouvoir le potentiel d’affaires en Algérie et informer les entreprises allemandes sur les conditions cadre et règles en vigueur.
Une dynamique qui gagne en importance, sous l’impulsion du nouveau directeur général de la chambre algéro-allemande Christoph J. Partsch, un juriste de formation qui a mené une carrière d’avocat d’affaires internationales pendant quinze ans. Il a débuté son parcours professionnel au sein de l’agence allemande de la privatisation des entreprises publiques en Allemagne de l’Est et a notamment mené les négociations pour la privatisation des complexes pétrochimiques dans cette région au début des années 1990.
Une expérience d’une grande utilité à ce nouveau poste, le marché algérien étant « juridiquement compliqué », comme il l’avait précisé lors de sa prise de fonction. La chambre algéro-allemande a réaffirmé sa volonté de faciliter les investissements des PME allemandes, principalement dans le secteur des énergies renouvelables qui recèle de nombreuses opportunités. « L’Algérie dispose d’un grand potentiel en la matière et l’Allemagne en a besoin, résume Amelia Zinke. Outre les soutiens à court terme, les engagements de l’Allemagne s’accompagnent de transferts de technologie et de savoir-faire, mais aussi d’investissements dans le domaine de la formation. » Bien décidé à abandonner le choix du nucléaire, le voisin de la France a déjà signé trois contrats avec l’Algérie en matière d’énergie verte, dont une convention pour la réalisation d’une usine de fabrication de panneaux photovoltaïques pour un montant de 300 millions d’euros.
Situé à Rouiba, dans le nord du pays, ce gigantesque site produira ses premiers panneaux solaires à la fin de l’année 2013. Il permettra la production de quelque 115 MW par an. La demande d’énergie verte existe sur le plan national, mais est surtout très forte sur le plan international. Le marché européen forme un futur client majeur pour l’exportation d’électricité conçue par la filière solaire. L’usine de Rouiba représente une première étape importante vers le développement d’une filière industrielle dédiée aux énergies renouvelables. La visite à Berlin du président algérien Abdelaziz Bouteflika, en décembre dernier, a donné un autre coup d’accélérateur aux collaborations bilatérales. La mise sur pied d’une commission économique mixte algéro-allemande destinée à préparer l’entrée de l’Algérie dans le projet Desertec était l’un des grands objectifs de cette visite.
La mission du plan Desertec, lancé par des entreprises allemandes, est de créer d’ici quarante ans un vaste réseau d’installations éoliennes et solaires en Afrique du nord et au Moyen-Orient afin de fournir à l’Europe jusqu’à 15 % de sa consommation d’électricité. « Le déplacement du président Bouteflika a donné une forte impulsion à la coopération bilatérale, notamment à travers l’annonce de la création de cette commission mixte », estime Amelia Zinke. La première session de cette commission, coprésidée par Mohamed Benmeradi, le ministre algérien de l’Industrie, de la PME et de la Promotion de l’Investissement, et par Bernd Pfaffenbach, le secrétaire d’État allemand à l’Économie et de la Technologie, s’est tenue en mars dernier.
Son objectif était de poser les premiers jalons pour une meilleure coopération économique dans le but d’attirer des investissements, de soutenir les échanges commerciaux et de mettre en œuvre des projets communs. « À l’avenir, il faudra instaurer des groupes de travail, examiner des dossiers dans le domaine de la formation professionnelle, de la coopération industrielle, des investissements, des transports et de l’infrastructure. Autant de points stratégiques à travailler pour rendre les collaborations toujours plus efficaces », poursuit-elle.
La Chambre de commerce algéro-allemande a été créée en octobre 2005 à l’initiative de 45 entreprises algériennes et allemandes. Elle compte aujourd’hui 700 entreprises adhérentes (dont 200 allemandes) et fait partie du réseau international de la Fédération allemande des chambres de commerce à l’étranger. Elle organise des activités aussi bien en Algérie qu’en Allemagne. La chambre succède à l’Association pour la promotion des relations économiques algéro-allemandes (APREAA), qui œuvrait jusqu’en 2005 pour rapprocher les deux pays.
Tout opérateur allemand ayant des liens économiques avec l’Algérie et toute entreprise, institution, association algérienne ayant des rapports économiques avec l’Allemagne sont invités à devenir membre de la chambre. Pour continuer à tisser des relations constructives, l’organisation peut s’appuyer sur le programme d’accompagnement d’entreprises allemandes sur le marché algérien (VHP) du ministère allemand de l’Économie et de la technologie. Cette opération se destine à promouvoir et distribuer des produits et services des entreprises des länders allemands sur des marchés étrangers.
L’AHK a déjà conduit avec succès ce programme au cours des années précédentes. En 2011, celui-ci s’adresse plus spécifiquement aux entreprises des secteurs de l’industrie et de l’agriculture. Il consiste à mener pour les entreprises intéressées un travail de recherche dans le but d’évaluer leurs chances d’accès au marché algérien. L’accompagnement de ces sociétés doit déboucher sur des mises en relation avec des partenaires potentiels locaux. Le service économique de la chambre appelle les entreprises algériennes actives dans les secteurs de l’industrie et de l’agriculture à se faire connaître. En marge de tous ces projets, les actuelles révolutions des pays arabes conduisent les autorités algériennes à rappeler que la finalité sociale doit rester le but de tout développement économique.
Échaudée par l’expérience de la Tunisie, l’Assemblée populaire nationale (APN) rappelle que l’objectif essentiel de tous les projets est la satisfaction des exigences sociales du peuple algérien auquel on doit garantir la juste répartition des richesses et l’ouverture de perspectives dans le domaine de l’emploi. Les moyens de dynamiser les relations entre l’Algérie et l’Allemagne et l’expérience démocratique en Algérie ont été au centre de la rencontre qui a réuni en mars dernier le président de l’APN Abdelaziz Ziari et le président du groupe parlementaire d’amitié « Allemagne – Pays du Maghreb » Günter Gloser. Des rendez-vous qui sont censés ancrer le volet social dans toutes les priorités.