Alors qu’en 2011, seules 18,4 % des entreprises allemandes exportatrices avaient abordé l’Afrique, un an plus tard, elles étaient plus d’un cinquième a avoir mis le pied sur ce continent. Ces statistiques, qui résultent d’une enquête effectuée par la DIHK, la fédération des chambres de commerce allemandes, confirment l’intérêt croissant de ses membres pour l’Afrique. Alors que, jusqu’à présent, les entreprises allemandes, dont de nombreuses PME, se limitaient à entretenir des relations commerciales sur le marché sud-africain, elles s’aventurent aujourd’hui plus en profondeur dans le continent. Le Ghana, la Tanzanie, le Kenya, le Nigeria et l’Angola sont les nouvelles destinations des denrées allemandes.
L’Afrique est, selon les conclusions de cette enquête, le continent où les engagements des entreprises allemandes croissent le plus rapidement. Une tendance qui devrait perdurer selon Heiko Schwiderowski, expert en charge du continent africain auprès de la DIHK : « Le volume d’exportation vers l’Afrique devrait augmenter à une vitesse de 10 à 15 % par an, alors que les exportations allemandes dans leur ensemble ne connaîtront qu’une croissance de 4 % cette année.»
Autre chiffre révélateur de ce boom commercial : le taux d’entreprises allemandes s’engageant sur les marchés de l’Afrique sub-saharienne tend à augmenter, alors qu’il stagne à 37,5% dans la région Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord.)
Relations triangulaires
Si les exportations vers l’Afrique ne totalisent aujourd’hui que 2% du total des exportations allemandes, les entreprises ont pris conscience du potentiel d’expansion que représente ce continent.
Les exportateurs allemands, dont la majorité d’entreprises issues de la machine outils, des biens d’équipements, de la construction mécanique et des installations industrielles, tirent partie du développement suscité par l’exploitation des sous-sols. «Nos entreprises ont décelé l’intérêt des infrastructures mises en place par les chinois pour l’exploitation des minerais africains : réseaux routiers, infrastructures portuaires, voies ferrées et capacités énergétiques. Ces dispositifs facilitent et rendent meilleur marché la production sur place», analyse Heiko Schwiderowski. Cependant, les entrepreneurs allemands ne se contentent pas de profiter de l’avancée chinoise, ils entendent apporter leur expertise, notamment sous la forme de normes.
«Très souvent, les standards de qualité chinois ne satisfont ni les consommateurs locaux ni les gouvernements africains, qui privilégient le savoir-faire allemand en matière de standards », remarque Heiko Schwiderowski. Il observe que «de plus en plus de gouvernements africains s’efforcent d’établir des «coopérations triangulaires.» Selon ce schéma, les projets d’infrastructures sont remis aux Chinois en raison de leurs process décisionnels rapides et de leur poids financier. «Toutefois, la réalisation est confiée à des entreprises allemandes en vertu du savoir-faire de l’ingénieur allemand », se félicite Heiko Schwiderowski, qui précise que l’implication de la main d’oeuvre locale constitue le troisième maillon de la coopération.
L’Asie de demain
Pour autant, l’enthousiasme des entreprises est aujourd’hui freiné par la situation politique au Mali, ainsi que par les suites des « printemps arabes ». L’étude «Going International », effectuée par la DIHK en janvier dernier auprès de 2500 entreprises allemandes engagées au niveau mondial, confirme un certain flottement. Le solde d’avis positifs sur la conjoncture et la situation commerciale en Afrique sub-saharienne est retombé de 33% en 2012 à 23 % aujourd’hui. Il reste cependant supérieur aux avis portés sur la situation commerciale dans le monde (18 %) et en Europe (11%). De manière générale, ni les fortes disparités subsistant au sein du continent africain, ni l’importante volatilité des prix des matières premières ne font reculer significativement les entreprises allemandes dans leur quête de ce marché d’un milliard de consommateurs.
Sur le sol allemand, les initiatives en faveur des relations économiques avec l’Afrique se multiplient : la rencontre de 400 chefs d’entreprise allemands avec 48 ambasssadeurs africains en février dernier à Berlin (voir Actu-CCI), le forum énergétique germano-africain* ou encore l’Africa Business Week**. Portées par cette dynamique, les entreprises allemandes poursuivent leur poussée vers l’Afrique sub-saharienne, que d’aucuns n’hésitent pas à comparer à l’Asie de demain. « Cette région enregistre un développement comparable à ce que les pays asiatiques ont connu il y a quelques années », affirme Richard Clemens, secrétaire général de la fédération des fabricants de machines d’emballages auprès de la confédération de la construction mécanique, la VDMA. Et de préciser «L’essor économique de certains pays africains liés aux richesses énergétiques suscite une demande croissante en denrées alimentaires transformées et emballées ».
Nourrir les hommes
Ces industries opèrent certes encore dans des niches avec un volume importé de 910 millions entre 2009 et 2011, soit 5 % des exportations ! Elles ne fondent pas moins leurs espoirs dans le marché agro-alimentaire africain qui enregistrera, avec 7 à 10 % de croissance, un taux supérieur à la moyenne des secteurs économiques( 6 %).
Les chefs d’entreprise allemands détectent de nouveaux débouchés, principalement au Nigeria, en république démocratique du Congo, au Kenya et au Ghana. «En Afrique, les machines à emballer apportent l’hygiène nécessaire tout comme elles améliorent le transport, la conservation et la répartition», assène Peter Steindl, dirigeant de Fawema GmbH. Présent depuis des nombreuses années en Afrique sub-saharienne, Fawema fabrique des machines d’emballages destinées aux produits agro-alimentaires comme le sucre et la farine. Il a ainsi adapté ses machines aux habitudes locales et elles emballent les denrées en très petites quantités.
* Hambourg et Hanovre du 7 au 10 avril
** Francfort du 22 au 26 avril