Une fois les réseaux télécoms hauts débits déployés, de nombreux pays dans le monde mettent en place le gouvernement électronique (e-Governing) et l’administration électronique (e-Administration). Ils cherchent ainsi à mieux informer citoyens et entreprises et, surtout, à dématérialiser un certain nombre de procédures administratives pour gagner du temps dans les échanges avec l’État et économiser de l’argent sur les impressions de formulaires et les timbres postaux. Une productivité à laquelle s’intéresse l’Afrique de l’Ouest et, notamment, le Sénégal, qui a reçu en 2007 le prix TIGA (Technology in Government in Africa) pour son site www.demarches.gouv.sn, qui permet de demander fiches d’état-civil, carte d’identité ou passeport, de s’informer sur les impôts, taxes et douanes, voire de déposer des demandes de permis de construire.
Dématérialisation, participation
« Sans avoir à se déplacer, souvent de très loin, les citoyens accèdent désormais à l’information pertinente sur Internet. Entre autres, il leur est indiqué que telle procédure ne doit prendre que trois jours. Ils peuvent alors exiger que l’administration respecte ce délai pour délivrer l’acte qu’ils demandent », explique Mayoro Diagne, chef de projet à l’Adie (Agence de l’informatique de l’État) qui dépend directement du secrétariat général de la présidence de la République du Sénégal. « Cependant, chaque administration essaie de mettre en place son propre outil informatique. Certaines structures sont très avancées, d’autres nettement moins. » Pour rééquilibrer cette situation et harmoniser les développements informatiques sans les imposer, l’Adie a conçu Safi (Système administratif des formalités informatisées), une plate-forme générique de gestion des formulaires électroniques. « Nous avons commencé avec la DGID (Direction générale des impôts et domaines). Plus particulièrement avec le Centre de grandes entreprises qui regroupe les 600 entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse le milliard de francs CFA (1,5 million d’euros) », renchérit Mohamadou Mbengue, chef de projet Safi qui, depuis 2005, a utilisé ERP5, un ERP (Enterprise Resource Planning, ou PGI : Progiciel de gestion intégré) Open Source (logiciel libre à code source ouvert) de la société française Nexedi, organisatrice du transfert de technologie vers l’Adie.
Première application de Safi : le lancement en mai dernier de TéléTVA, une plate-forme Internet prototype qui dématérialise la déclaration de la TVA auprès d’une cinquantaine de sociétés pionnières parmi lequelles Sonatel (le plus gros opérateur télécom du pays), Bicis (Banque internationale du commerce et de l’industrie du Sénégal, filiale de BNP-Paribas) et SAR (Société africaine de raffinage). « Nous avons travaillé avec ces entreprises volontaires et la DGID afin d’optimiser le fonctionnement de la TéléTVA et la qualité des interfaces », ajoute Mohamadou Mbengue. « Car jusqu’ici, il fallait se déplacer à la DGID pour retirer le formulaire de TVA, le remplir, le ramener et payer. » De quoi encourager les entreprises à aller plus loin. « À présent, nous testons l’ensemble du processus de la téléTVA, avec saisie des données à distance et paiement électronique en ligne », précise Mouhammed Tidiane Seck, directeur général de l’Adie. L’aspect monétique est développé avec Ferlo, le GIE (Groupement d’intérêt économique) formé par AfricapFund, un fonds d’investissement spécialisé dans la microfinance, et Byte-Tech, un éditeur de logiciels expert des systèmes de paiement électronique.
Fer de lance de l’innovation
Toujours à partir des logiciels Open Source, notamment ceux de Nexedi, l’e-Governing sénégalais appuie sur le champignon. D’abord en développant des interfaces entre l’informatique de l’État et les principaux logiciels de comptabilité utilisés par les entreprises (Sage, Cegid…). Ensuite, l’Adie a industrialisé avec ERP5 un logiciel gratuit de comptabilité, paie et gestion budgétaire pour les administrations, adapté aux normes Syscoa (Système comptable ouest-africain ; West African Accouting System). Enfin, en rajoutant le logiciel libre Scribus, cette agence de 60 personnes dispose d’une plate-forme générique permettant de créer d’autres téléprocédures de façon très simple, quasi en un clic. Pour l’heure, dans le sillage de TéléTVA, sont ainsi testées les taxes sur les opérations bancaires, les produits pétroliers et les produits alcoolisés.