Un divorce, une perte de confiance, un climat de défiance. Les observateurs de la finance ne tarissent pas de critiques à l’égard du comportement des banques privées souvent jugé attentiste au cours de la récente crise souvent jugé attentiste. « Bon nombre d’investisseurs ont perdu gros. Ils reprochent à leur conseiller de ne pas être assez réactif, de ne pas avoir été informés des risques qui se profilaient, de ne pas avoir proposé d’alternatives pour repositionner les investissements », énumère Paul Thurston, directeur de la banque de détail et de la division gestion de patrimoine du groupe HSBC. Selon plusieurs études, 80 % des clients estiment que les banques ont pris des risques trop importants.
Et moins du quart d’entre eux pensent qu’ils ont tiré les leçons de la crise. Même en Suisse, où les conséquences ont été moins sévères qu’ailleurs, 41 % de la clientèle déclare n’être plus enthousiasmée à l’égard de leur banque. Une seule enquête, réalisée en Autriche en collaboration avec l’université Johannes Kepler à Linz, contredit cette tendance. Elle souligne que « les banques privées autrichiennes ont su conserver, voire accroître la satisfaction de leurs clients pendant la crise financière ». Un succès attribué à « la proximité de ces établissements avec leur clientèle et à l’intensité du suivi ». En matière d’allocation d’actifs, ces investisseurs ont continué de privilégier les placements en actions, leur part au patrimoine moyen se fixant à 32 %. Les sondés révèlent s’être distancés à temps des dérivés, des placements alternatifs à risque, pour opérer des transferts considérables vers les matières premières, l’or ainsi que d’autres métaux précieux, et surtout des liquidités.
Nouvelles stratégies
Conscientes de la nécessité de mieux repositionner leur offre et d’adopter des méthodes différentes, les banques privées procèdent à des changements de fond. Elles tentent notamment de capter la clientèle haut de gamme qui héberge son patrimoine dans d’autres types de structures. Selon une étude du cabinet Bain & Company, 40 % des encours des clients les plus fortunés demeurent actuellement au sein des réseaux d’établissements bancaires de détail. Cette situation offre un relais de croissance important, en particulier pour les groupes mutualistes. Ces dépositaires, en effet, qui sont détenteurs de plus de 150 000 euros d’actifs financiers, constituent une cible de choix pour la gestion privée. Les banques à réseau détiennent 45 % de parts de marché sur ce segment. Cette pro-portion atteint même les 71 % pour la clientèle dont les avoirs se situent dans une fourchette variant de 150 000 à 500 000 euros. « C’est une population qu’il est intéressant de pouvoir attirer », estime ainsi Paul Thurston. « Pour redorer son blason et redresser la barre à court terme, il est important de se créer une nouvelle clientèle. C’est pourquoi de nombreux établissements tentent d’étendre ou de modifier leurs réseaux. »
Les banques privées réfléchissent également à se doter d’une architecture plus ouverte. Selon une enquête du cabinet Booz & Company, le modèle intégré de la gestion de fortune fait l’objet d’une grande attention. La méfiance qui règne à l’encontre des fournisseurs qui regroupent sous la même enseigne le conseil et les produits est très aiguë. C’est pour cette raison que certains établissements ont déjà séparé leurs unités chargées de l’asset management et du conseil à la clientèle. « D’autres acteurs du marché vont sans doute suivre cet exemple. À l’avenir, les banques proposeront une offre au sein de laquelle les clients pourront choisir parmi un nombre plus grand de produits, provenant de différentes sociétés dans chaque catégorie de placement », prédit Paul Thurston. Se rapprocher des fortunes les plus élevées constitue une autre priorité pour certains établissements. Les banques positionnées sur de très importants patrimoines ont mieux échappé aux aléas de la crise financière.
« De nombreux managers assurent que la banque privée et les différents métiers qui la composent vont se modifier de manière irrévocable, et que d’autres adaptions sont en vue », indique le responsable de HSBC. Autre nécessité au programme : redéfinir son modèle offshore. La chasse croissante aux avoirs non déclarés va désormais obliger les banques déployant leurs activités à l’étranger à se repositionner, ne serait-ce que par souci d’image ou d’optimisation de leurs coûts. Dans de nombreux pays en effet, la pression des administrations fiscales a conduit les investisseurs à se mettre en conformité avec de nouvelles règles locales, plus contraignantes, ou à rapatrier leur fortune. « À l’heure où les réglementations évoluent rapidement, c’est à chaque établissement de savoir si son implantation sur tel ou tel territoire est toujours pertinente », souligne finalement Paul Thurston.
Services professionnels : se rapprocher des entreprises
« Des entrepreneurs plutôt que des financiers. » C’est avec ces mots qu’Olivier Roy, directeur général de KBL Richelieu, décrit les dirigeants de son groupe, soucieux de mettre en avant un état d’esprit susceptible de séduire la clientèle entreprises. Animées par la volonté d’améliorer le degré de satisfaction de leurs clients, de nombreuses banques privées focalisent une part de leurs activités sur l’accompagnement des professionnels. En novembre 2009, la fusion des banques Neuflize OBC et Neuflize OBC Entreprises a donné naissance à une entité particulière dotée d’un business model innovant destiné à rapprocher les compétences. « Dans ces deux structures qui fusionnent, on trouve une clientèle familiale de très longue date préoccupée par la valorisation d’un patrimoine à la fois professionnel et personnel. L’idée est de renforcer notre offre auprès d’entrepreneurs pouvant connaître des problématiques patrimoniales significatives », décrivait au lendemain de la fusion Hervé de Rocquigny, codirecteur de la nouvelle entité. Une manière de se rapprocher des dirigeants et de leurs préoccupations.
Le cœur de ce regroupement recèle un pôle conseil, avec notamment un pôle d’ingénierie patrimoniale (organisation de la fortune, optimisation fiscale…) et un pôle d’ingénierie financière qui traite des questions de financement structuré liées aux opérations sur les entreprises (OBO, LBO, rachat de parts minoritaires, fusions-acqui-sitions…). Si une opportunité de croissance externe se présente pour le client, la banque propose un examen méticuleux des business plan, des structurations de capitaux et des cash-flows (les flux de trésorerie, ndlr) futurs. Un accompagnement de croissance externe qui est parfois complété par une proposition de crédit lorsque la situation nécessite de faire entrer des capitaux extérieurs. KBL Richelieu fait également des entreprises « un axe de développement majeur pour les années à venir », comme l’indique Olivier Roy. Le groupe propose des réflexions sur des évolutions capitalistiques comme la cession d’entreprise et la recherche de capitaux pour renforcer les fonds propres de la société. KBL Richelieu décèle les besoins sur ce plan et présente aux entreprises clientes des interlocuteurs ou partenaires sur le marché français, européen et mondial.