En Australie, le débat économique sur la lutte contre le changement climatique est relancé

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Illustration : Thierry Cap de Coume
Revenue sur le devant de la scène politique australienne, la question de l’attribution d’un prix au carbone via la création d’un marché d’échange d’émissions de gaz à effet de serre ou d’une taxe carbone, suscite l’inquiétude des milieux économiques.

La nouvelle position adoptée par le Premier ministre australien, Julia Gillard, n’exclut pas l’attribution d’un prix au carbone via la création d’un marché d’échange d’émissions de gaz à effet de serre ou d’une taxe carbone. Avant les élections législatives anticipées de septembre, la travailliste Julia Gillard était opposée à l’introduction d’une telle taxe en Australie. Confirmée de justesse à son poste grâce au soutien d’un élu écologiste et de trois élus indépendants, elle n’est plus aussi catégorique : le gouvernement étudiera toutes les options proposées par le nouveau comité sur le changement climatique.
Le débat est relancé. Il y a presque deux ans, le gouvernement du travailliste Kevin Rudd avait envisagé la mise en place d’un schéma de réduction de la pollution au carbone pour les entreprises avec un permis pour chaque tonne d’émission de CO2. Ayant remplacé Kevin Rudd à la tête du gouvernement fin juin, Julia Gillard semble aujourd’hui prête à envisager toutes les solutions. Une position critiquée par le chef de l’opposition au Parlement Tony Abbott et par des entreprises représentées par la Chambre australienne (ACCI). D’après les résultats d’une étude menée par l’ACCI auprès de plus d’un millier de chefs d’entreprises, une majorité d’entre eux plaide au contraire pour des mesures de promotion d’une meilleure efficacité énergétique.
Pour le président de l’ACCI, David Michaelis, attribuer un prix au carbone, via une taxe, présente plusieurs inconvénients. Premier d’entre eux : un doublement des prix de l’énergie d’ici à 2015. « Cela favorisera les poussées inflationnistes tant directement, via une hausse des prix de l’énergie, qu’indirectement, via une hausse des prix des produits et des services », affirme-t-il. Deuxième inconvénient : elle nuirait à l’économie du pays. « Étant donné l’importance pour notre économie des échanges commerciaux avec l’étranger, la création d’une taxe aura un impact négatif sur notre compétitivité internationale, sur nos perspectives de croissance et sur nos emplois », craint-il.
Certes, les partisans d’une taxe carbone soutiennent que les revenus issus de ce nouvel impôt encourageraient une diversification de l’économie australienne qui lui serait bénéfique à long terme. Ainsi, l’Australie pourrait produire, opérer et exporter des infrastructures dans le domaine des énergies renouvelables, et créer du même coup des milliers d’emplois. Selon eux, laisser les autres pays prendre le leadership pourrait à l’inverse avoir des conséquences désastreuses pour l’économie. Mais à en croire l’ACCI, ces arguments sont fallacieux. « Seule l’Europe semble envisager d’attribuer un prix au carbone, souligne David Michaelis. Les États-Unis misent sur une plus grande efficacité énergétique et la mise en place de standards de réduction d’émissions. Quant à la Chine, elle privilégie une approche technologique. »
Nuisible pour l’économie, une taxe carbone serait enfin, pour David Michaelis, inefficace pour l’environnement. C’est son troisième et dernier inconvénient. « Les gros consommateurs d’énergie tâcheront de relocaliser leurs opérations là où les règles seront moins contraignantes », prévoit-il. L’ACCI propose ainsi que les entreprises puissent passer en provision les coûts liés à leurs futurs investissements dans des installations plus efficaces et moins émettrices de CO2. Elle demande également au gouvernement de publier sans délai son livre blanc sur l’énergie pour faire connaître les besoins et sources d’énergie envisageables pour soutenir la croissance de l’économie. « Attribuer un prix au carbone interrompt les investissements nécessaires en vue d’une production de charbon plus efficace et plus propre, et nous amène vers un modèle où l’économie australienne dépendra des énergies renouvelables et de nos ressources gazières incertaines », conclut David Michaelis. « Le gouvernement devrait se concentrer sur la promotion d’une plus grande efficacité énergétique et sur le développement des technologies à court terme, et évaluer la capacité de l’économie à gérer les évolutions au sein de son mix énergétique à long terme. »

www.acci.asn.au

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